Clause de non concurrence abusive : comment la contester ?
Au sein de nombreux contrats de travail, l’employeur prévoit une clause de non-concurrence. Cette clause interdit d’aller exercer des fonctions similaires à celles de son ancien emploi, après la rupture du contrat de travail, chez un concurrent. Bien souvent, ces clauses ne sont pas adaptées à la réalité de la fonction exercée dans l’entreprise. De plus, elles sont généralement rédigées en des termes trop imprécis pour être reconnues comme étant valides en vertu du droit du travail.
A quoi sert une clause de non-concurrence abusive insérée dans un contrat de travail ? Quelles sont les conditions à respecter pour qu’elle soit valablement rédigée conformément au droit ? Quelles sont les obligations de l’employeur ? Comment contester une clause de non concurrence en vertu du Code du travail ? On vous explique tout ce qu’il faut savoir sur la clause de non concurrence abusive.
A quoi sert une clause de non concurrence dans un contrat de travail ?
Une clause de non-concurrence peut être prévue dans un contrat de travail par l’employeur. Cela signifie que, après la rupture de son contrat de travail, le salarié a pour interdiction d’exercer une activité dans une autre société qui porterait préjudice à son ancien employeur. Cette clause vient ainsi limiter la liberté du salarié, après la rupture du contrat de travail, d’exercer une fonction équivalente chez un concurrent ou en indépendant.
Cette clause étant privative de liberté pour l’ancien salarié, pour qu’elle soit valable, des critères très stricts doivent être respectés.
Bon à savoir : la clause de non-concurrence ne doit pas être confondue avec l’obligation générale de loyauté qui s’applique pendant l’exécution du contrat de travail.
Clause de concurrence abusive : comment la reconnaître ?
L’article L1121-1 du Code du travail dispose que “Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché”.
En se basant sur cet article juridique, les juges, dans un arrêt de la Cour de cassation de 2002 (chambre sociale de la Cour de cassation, 10 juillet 2002, n°00-45135 et n° 99-43.334 à 99-43.336) ont fixé les 4 conditions cumulatives nécessaires pour que cette clause soit reconnue comme étant valide. Ainsi, un formalisme strict doit être respecté par l’employeur et des garanties raisonnables et non abusives doivent être apportées au salarié.
Voici les 4 conditions à respecter pour qu’une clause de non concurrence, prévue dans un contrat de travail, ne soit pas considérée comme étant abusive conformément au droit du travail :
- la clause de non concurrence doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise (exemple : en cas de contact avec la clientèle de l’entreprise, accès à des informations confidentielles, transmission d’un savoir-faire, transmission de secrets de fabrication ou industriel, etc.).
- la durée dans le temps et l’espace géographique de la clause de non concurrence doivent être limités ;
- la clause de non concurrence doit tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié dans l’entreprise ;
- la clause de non concurrence doit être assortie d’une contrepartie financière dont le montant ne doit pas être dérisoire. Cette contrepartie financière doit être versée à par l’employeur du fait de la restriction de la liberté professionnelle du salarié.
Le respect de ces conditions par l’employeur a pour but d’équilibrer les intérêts de l’entreprise et la liberté de travailler du salarié. C’est notamment pour cette raison que la contrepartie financière prévue dans le contrat de travail ne doit pas être dérisoire. Le cas échéant, les juges estiment que cela équivaut à une absence de contrepartie et le salarié pourrait demander en justice des dommages et intérêts à l’entreprise.
Dans le cas où la clause de non-concurrence ne respecterait pas ces conditions, elle pourrait être annulée et/ou le préjudice subi par le salarié pourrait être indemnisé.
Plus l’emploi est spécialisé et plus il est dur de retrouver un emploi dans le domaine en question, plus :
- la contrepartie financière prévue par la clause de non concurrence devra être élevée ;
- et/ou la période d’exécution de la clause devra être limitée ;
- et/ou le périmètre géographique devra être le plus limité possible.
En moyenne, l’employeur doit prévoir, au sein d’une clause de non concurrence, d’indemniser le salarié à hauteur d’un tiers de son ancien salaire (par mois) au minimum.
En outre, le droit du travail prévoit que si le salarié est soumis à une clause de non concurrence, la contrepartie financière lui est due, même en cas de licenciement pour faute grave (et a fortiori de licenciement pour faute simple) par l’employeur ou de démission.
Bon à savoir : les conditions exigées pour que la clause de non-concurrence ne soit pas abusive peuvent varier selon les domaines et les conventions collectives applicables. De ce fait, si une convention collective prévoit des critères plus favorables à ceux prévus dans un contrat de travail, ce sont les critères de la convention collective qui devront s’appliquer.
Que faire pour contester une clause de non concurrence abusive ?
Si votre employeur n’a pas respecté les critères de validité de la clause de non concurrence (par exemple, la clause n’est pas assez précise), cette clause est alors abusive, ce qui entraîne sa nullité. En vertu du droit du travail, une clause de non concurrence abusive n’a pas vocation à s’appliquer.
Par conséquent, si vous êtes dans cette situation, vous pouvez contester l’application de cette clause prévue dans votre contrat de travail. Vous devez, pour cela, envoyer à votre employeur ou ancien employeur une lettre de mise en demeure pour lui signifier que vous contestez la validité de la clause de non concurrence ainsi que vos arguments juridiques et d’autres informations obligatoires. Pour rédiger cette lettre valablement, faites appel à Justice Express, l’expert de la résolution amiable des litiges, qui s’occupera de cette démarche pour vous, grâce à ses juristes et huissiers partenaires.
Sachez que la loi prévoit que vous pouvez également prétendre à une indemnité, si vous avez subi un préjudice causé par une clause de non-concurrence. Si vous souhaitez faire annuler cette clause, vous pouvez saisir le juge compétent grâce à Justice Express, sans frais d’avocat.
Si la clause est trop restrictive pour le salarié, le juge peut restreindre son application dans le temps, l’espace, ou en prévoyant d’autres conditions supplémentaires. Si la clause de non concurrence est abusive car elle ne prévoit pas de contrepartie ou une contrepartie insuffisante, le salarié pourra en toute légalité :
- ne pas respecter la clause de non-concurrence qui figure dans son ancien contrat de travail (exemple : en exerçant une activité similaire chez un concurrent) ;
- demander des dommages et intérêts pour réparer le préjudice qu’il a subi du fait de la clause de non concurrence abusive à son ancienne entreprise ;
- exiger de son ancien employeur le paiement de la clause de non concurrence pendant tout le laps de temps où il l’a appliquée.
Par ailleurs, le versement de l’indemnité du fait de l’application de la clause de non-concurrence doit être fait après la cessation de la relation de travail, et non pendant son exécution. A défaut, si tout ou partie de la contrepartie financière a été versée avant la rupture du contrat de travail, les juges risquent de juger que ce solde est dérisoire et donc que la clause est nulle.
Du fait de toutes les conditions imposées, il est fréquent qu’une clause de non-concurrence soit jugée abusive par les juges. Il est recommandé de bénéficier des conseils d’un avocat pour déceler les erreurs commises par l’employeur lorsque l’on souhaite contester cette clause.
Bon à savoir : un employeur peut lui-même dispenser son ancien salarié de l’obligation de non-concurrence qu’il avait prévue au sein du contrat de travail. Par conséquent, il ne devra pas lui verser d’indemnité puisque l’ancien salarié pourra librement aller travailler chez la concurrence ou devenir lui-même un concurrent. Les employeurs ont ainsi pris l’habitude de prévoir contractuellement la possibilité de renoncer à l’application de la clause de non-concurrence dans le but d’être dispensé du paiement de la contrepartie financière. La renonciation à la clause de non-concurrence doit au préalable avoir été prévue au sein du contrat de travail ou dans la convention collective. Dans le cas contraire, l’employeur doit obtenir l’accord du salarié à cette renonciation par avenant au contrat.